VISION #41 - Yann Stofer

 
 

Il y a ce mot japonais, nagori, qui se traduit littéralement par le « reste des vagues », une sorte nostalgie de la séparation, et surtout la saison qui vient de nous quitter. C’est souvent ce que l’on ressent face aux derniers jours des vacances d’été. Après un temps de pause, on s’apprête à reprendre le cours de nos vies, avec, pourtant, toujours cette envie d’être ailleurs, loin de la frénésie des villes et du temps qui passe, inexorablement.

La frénésie, l’agitation, je la ressens bien chez Yann Stofer, ancien batteur, désormais photographe, que je rencontre une soirée de fin d’été, dans le 11ème arrondissement, à Paris. C’est Julien Magre - interviewé lors de la troisième saison du podcast - qui m’avait parlé de son fascinant travail. Après une bière bien fraîche, Yann, crâne rasé, tatouages répartis sur tout le corps, débit de parole bouillonnant, m’invite dans son petit bureau. Il s’ensuit un entretien généreux, parfois décousu, à l’instar de son parcours de vie, mais drôlement intéressant et riche en informations et expériences.

 
 
Photo : Yann Stofer, Brume, Charly, Raymond et Joseph, 2017
 
 

Chaque vision est singulière, porteuse de sens et de changement. Le but de ce format est de rassembler de nombreux artistes et que chacun nous délivre sa vision et son expérience de la photographie.

 
 
Photos : Yann Stofer, projets personnels
 
 

Yann Stofer, né en 1977, est un photographe et musicien français qui aborde le monde à contre-pied. Son parcours atypique se dessine entre la scène, la route et le cinéma. Il a officié en tant que batteur, d’abord avec des groupes locaux à Bordeaux, puis a tourné pendant plus de 10 ans, en Europe et aux États-Unis avec le groupe électro-rock Adam Kesher — collaborant pour ses disques et musiques de publicité, entre autres, avec Cassius, Phoenix, A-Trak, M.I.A, ou encore Agnès B, Yves Saint Laurent et Chanel.

En complément de la musique, il se rapproche, pour un temps, de la mise en scène et travaille sur les plateaux de cinéma dès les années 2000 en tant que premier assistant réalisateur. C’est tout proche des caméras et des directeurs de la photographie, qu’il affute son œil.

 
 
 
 

À ses heures perdues, grâce à la photographie, il documente les péripéties de son groupe durant dix années intenses sur la route. Il saisit de manière effrénée les fragments de scènes vécues ou rêvées entre deux villes, deux concerts, qu’il publie tel un carnet de route, dans son premier livre A House is Not a Home (2013) aux éditions Kaiserin. Ses expériences au sein du milieu de la musique et du cinéma, façonnent un style unique : dynamique et alternatif, rejetant les conventions et la narration classique.

 
 
Photos : plus haut - Yann Stofer, Évry Danse, 2014 ici - portrait de David Cronenberg et projets personnels
 
 
 

« On doit faire énormément d’images avant d’en trouver une qui nous parle. Je prends souvent des photos sans aucune intention et qui trouvent un public et une résonance bien plus tard. »

– Yann Stofer

 
 
 
Photo : Yann Stofer, Japon, série en cours, photo décrite dans le podcast
 
 

Il est très vite appelé à réaliser des reportages et portraits posés pour des magazines et pochettes d’albums. Des commandes régulières le conduisent à parcourir tous les continents, que ce soit pour la presse (Vice, The New York Times, Vanity Fair), la publicité ou la réalisation de documentaires (Le Monde, Air France Magazine, Nouvel Obs). Habitué au voyage, il développe un imaginaire de la route, en résonance avec un état de mobilité perpétuelle. L’instinct affuté, se jouant des apparences, il provoque l’échange avec l’autre, saisit rapidement le cœur d’une action, l’ambiance d’un lieu, posant son image au plus proche de ses sujets.

En 2013, il s’associe spontanément à Julien Magre pour la création d’une fiction photographique, Poursuite, dans le décor désertique d’une ville de la Costa Blanca (Espagne). Ils mettent en scène une ambiance inquiétante, sur fond de polar, en détournant les codes de la série noire. Cette intrigue visuelle est mise en mots par le romancier et reporter Alexandre Kauffmann et fait l’objet d’une auto-édition en 2017.

 
 
 
 

Depuis une dizaine d’années, il travaille sur plusieurs projets personnels : Évry danse, série de portraits de danseurs de salon pendant les Internationaux, mise en scène de façon surprenante entre les vestiaires et la piste de danse sur fond de studio improvisé. Depuis 2018, il mène une enquête photographique (Even the bird is laughing at you) sur l’auteur de roman noir, Harry Crews, et sa ville, Gainesville (Floride, USA), composant la biographie de l’homme à travers l’ambiance des lieux. Ses photographies sont régulièrement exposées en France et à l’étranger et font partie de collections privées, dont Hermès depuis 2018. Début 2020, il réalise une série d’images dans les paysages énigmatiques de l’extrême nord du Japon : Hokkaido.

 
 
 

Le nouveau livre de Yann Stofer est disponible ici.

Lancement du livre Hokkaido et vernissage de l'exposition vendredi 16 décembre 2022 à partir de 18 heures, 25 rue Chanzy 75011 Paris.

Crédits :

Un podcast réalisé et écrit par Aliocha Boi, produit par Noyau.studio, monté et mixé par Virgile Loiseau et mis en musique par Perez.

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