VISION #32 - Myriam Boulos

 

Chaque année, l’agence Magnum Photos vote pour intégrer à sa prestigieuse liste de photographes de nouvelles recrues. La Libanaise Myriam Boulos (ainsi que le Français William Keo) ont été sélectionnés comme nominés à l’issue de la 74e assemblée générale. C’est ainsi que j’ai découvert le travail de cette talentueuse photographe. Rendez-vous à Paris pour un entretien un peu plus court que d’habitude mais riche en contenu et en musique. L’habillage sonore est signé Habibi Funk, label de réédition basé à Berlin, dédié à la musique du monde arabe. Une petite voix timide mais affirmée, Myriam Boulos introduit son univers en nous décrivant une photo très simple mais touchante : une toute petite fleur jaune qui semble léviter à l’intérieur d’une main élégante, celle de sa grand-mère. Bonne écoute.

 
Photo : Myriam Boulos, 2021, Dis aux arbres de sourire, première photo décrite
 
 

Chaque vision est singulière, porteuse de sens et de changement. Le but de ce format est de rassembler de nombreux artistes et que chacun nous délivre sa vision et son expérience de la photographie.

 
 

Cet épisode a été réalisé en partenariat avec Adobe France.
Vivez l’expérience Creative Cloud !

 
Photos : Myriam Boulos, Nightshift, 2015
 
 

Myriam Boulos est née à Beyrouth en 1992, avec les rêves collectifs du Liban d’après-guerre. Elle nous raconte un premier souvenir douloureux lié à la photographie, à l’âge approximatif de 4 ou 5 ans ; son petit frère jette son premier appareil photo par la fenêtre de la voiture lors d’un road trip. Sa famille décide de lui en racheter un à 6 ans, une caméra Fisher Price « toute rouge ».  À 16 ans, c’est le véritable déclic : Myriam Boulos décide de devenir photographe et commence à développer son regard. Depuis, la photographie a été selon elle « la chose la plus évidente et fluide dans sa vie ».

Comment expliquer son travail ? La photographe libanaise voue une véritable fascination pour les gens, les corps,  l’intime. À l’opposé de sa personnalité, ses photos sont contrastées, frontales, parfois perçues comme « agressives ». Elle déclare faire des images pour s’approcher au mieux de la réalité, d’où l’utilisation régulière du flash. Elle navigue à l’instinct entre le noir et blanc et la couleur et photographie surtout l’humain et quelques détails, principalement à Beyrouth, une ville à laquelle elle semble très attachée.

 
 
Photos : Myriam Boulos, Dead end, 2019
 
 

Vous êtes en train d’écouter le podcast ? Quelle belle musique pour accompagner les paroles de Myriam, n’est-ce pas ? On commence par Autopsie du complot d’Ahmed Malek, artiste et compositeur algérien. Titre intéressant. Les photos de Myriam le sont d’autant plus. On parle dans ce podcast de plusieurs projets : Dead End, Tenderness, en passant par Nightshift. Dans ces premières séries, la photographe pointe du doigt les signes d’une société patriarcale et capitaliste.

 
 
Photo : Myriam Boulos, Dead end, 2019, deuxième photo décrite
 

Le 4 août 2020, une double explosion au cœur du port de Beyrouth fait plus de 200 morts et prive 300 000 personnes de leur domicile. Quelques mois avant, le 17 octobre 2019, la révolution – la « thawra » – avait plongé dans la rue des milliers de Libanais qui dénonçaient la corruption endémique de leurs gouvernants. Les deux événements, pourtant très différents, se diluent l’un dans l’autre pour former le début d’une autre lutte. C’est ainsi tout naturellement que Myriam Boulos documente à sa manière ces deux moments historiques qui bouleversent le pays.

 
 
 

« Quand je fais des photos, j’essaie de mettre la lumière sur des choses qui sont normalisées quand elles ne devraient pas l’être. Les extérioriser à travers la photographie, c’est un premier pas pour les dénoncer. »

– Myriam Boulos

 
 
Photos : plus haut - Myriam Boulos, The Ongoing Revolution, 2019-2020
ici - série faite après l'explosion du port de Beyrouth, 2020
 
 

Myriam Boulos évoque ses dernières photos, plus simples dans leurs compositions. Elle prépare en ce moment un projet qui semble fascinant sur les fantasmes sexuels des femmes, que nous avons hâte de pouvoir regarder entièrement. Elle y mêle photos, textes et sons. Vous pouvez retrouver quelques bribes ici (juste en bas) et sur l’Instagram de la photographe.

 
 
Photos : Myriam Boulos, sexual fantasies, 2021-2022 (en cours)
 
 

Pour aller plus loin :

Mona Benjamin, Róisín Tapponi (Shasha, Habibi Collective), Mona Eltahawy, Lee Friedlander.

Crédits musique :

Merci au label Habibi Funk.
Ahmed Malek - Autopsie d'un Complot, Ouiness - Zina, Hamid El Shaeri - Ayonha, Ahmed Malek - Bossa.

Liens :

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Magnum Photos

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